Les dirigeants du football français ont toujours vendu du rêve. Un jour de mai 2018, ils ont bien cru que leur rêve allait se matérialiser quand un autre vendeur de rêves, leur a promis la lune, C’était le fameux milliard d’euros de droits TV, après lequel le football professionnel français, courait, comme un poulet sans tête. Voilà c’est de cette manière que Pierre Maes démarre son livre « la ruine du football français » publié chez FYP (2022) et qu’il nous entraîne dans un thriller qui s’inspire plus du jeu du poker menteur que d’une approche purement rationnelle de la finance.
D’un côté, il y a des propriétaires qui pour faire face au déficit d’exploitation de leurs clubs doivent remettre au pot à fréquence régulière. De l’autre, la croissance astronomique des droits TV en Europe des 30 dernières années qui favorise une inflation galopante et incontrôlable des salaires des joueurs et qui fait entrer les clubs dans une concurrence coûteuse. Exception européenne, la France n’a pas vu le montant de cession de ses droits TV suivre la même progression et le championnat de France est devenu, au fil du temps, un championnat de transition (de passage) pour les joueurs. Les clubs français n’étant pas capables de rivaliser dans leur grande majorité avec les salaires pratiqués.
L’auteur nous permet de voir comment la gouvernance de la Ligue Nationale de Football (LNF) évolue et quels sont les jeux de pouvoir entre les principaux dirigeants de club. A la fin des années 90, Noel Le Graet président de la Ligue ne plaît pas aux présidents des clubs huppés en raison de sa résistance au développement du football business. Il entend conserver un système de répartition égalitaire des droits TV. Lors des élections du 6 juillet 2000, il sera renversé par un seule voix d’écart au profit de Gérard Bourgoin (ex-vice-président et sponsor de Auxerre). Celui-ci, pour cause d’abus de bien social ne restera pas longtemps à la présidence et il laissera sa place à Frédéric Thiriez pour gérer ce qui va être la grande négociation de 2004 sur les droits TV enlevé par Canal + pour une somme époustouflante de 600 millions d’euros par saison.
Cette victoire donne envie à la LNF d’aller encore plus loin. Il est alors confié à Didier Quillot le soin comme Directeur Général de conduire la prochaine négociation. Toutefois, la guerre fait rage entre les petits et les grands clubs. Le sujet concerne évidemment la répartition des droits TV. Un second syndicat de club pro appelé « Premier Ligue » est créé en 2015 avec la volonté de faire sécession. En effet, la Premier League anglaise a été créé suite à un coup de force des clubs de cette ligue qui se sont accaparer la plus grande part des droits TV en abandonnant à leur triste sort les clubs pros des 3 divisions inférieures.
Une autre date très importante va être l’appel d’offres de la Ligue 1 organisée le 29 mai 2018. Les résultats sont spectaculaires puisque les droits vont augmenter de 60 % passant à un total par saison de 1,153 milliards d’euros. Dont 67 % soit 780 millions d’euros sont à la charge d’un nouveau venu à savoir Mediapro. Le reste est attribué à BeIN Sports et Free. Une première dans l’histoire puisque Canal + disparaît du paysage.
L’auteur nous permet de comprendre la légèreté des garanties prises par la ligue ainsi que la stratégie de Médiapro qui souhaite spéculer sur sa capacité à revendre ensuite les matchs à d’autres opérateurs. L’appât du gain a prévalu. Et pourtant la Serie A aurais pu être un bon exemple à suivre puisqu’il y avait déjà eu un précédent fâcheux avec ce groupe. Nous savons que Canal + ne va pas rentrer dans ce marchandage et que Mediapro va être en France dans l’obligation de créer sa propre chaîne de diffusion (Téléfoot). Tout reste alors possible pour son président Jaume Roures qui dispose de plus de deux ans pour vendre les droits TV sans avoir à débourser un euro. Mais la crise sanitaire modifie le contexte et change profondément la donne. Le projet de Médiapro devient injouable et c’est la fin d’une histoire qui va avoir des prolongements que l’auteur nous décrit minutieusement ainsi que sa manière de voir l’avenir pour un championnat de France confronté à une forte concurrence.
Nous vous proposons de découvrir son analyse de la situation actuelle du football français avec très prochainement l'épée de Damoclés d'une nouvelle consultation des droits TV qui pourrait être déterminante pour l'avenir de nos clubs pro.
Nous vous conseillons de découvrir le livre de Pierre Maes "La ruine du football français" - de crash Mediapro à la D3 européenne - chez FYP (2022)